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Cuisine italo-américaine, la red sauce qui prend

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Par Pomélo

Photos (c) Félix Dol Maillot pour Red Sauce

« Imaginez un lieu aussi animé que les meilleures trattorias italiennes, mais résolument américain par son esprit. Avec ce restaurant, nous souhaitons fusionner ces cultures, en proposant une cuisine à la fois ludique, nostalgique et naturellement branchée ». Voilà la promesse de Red Sauce, ouvert à Paris en mai 2025. Depuis linauguration, cest un carton, porté par lagence de relations presse Woki Toki, déjà à lorigine du décollage de Dumbo, spécialisé dans le smashburger. Chez Red Sauce, on vient pour une assiette de grosses boulettes de viande accompagnées d’une généreuse louche de ricotta et servies avec des morceaux de brioche à lail bien dorés, ou encore pour des rigatonis qui baignent dans une sauce tomate à la vodka.

  

Le nom de lenseigne est particulièrement bien trouvé : il renvoie aux « red sauce restaurants » (que l’on peut vulgairement traduire par « restos à la sauce tomate »), ces trattorias italo-américaines nées aux États-Unis avec larrivée massive dItaliens en quête dune vie meilleure. Entre 1880 et 1924, plus de 4 millions dentre eux, issus principalement du Sud de la péninsule, ont traversé lAtlantique en quête d’une vie meilleure. À New York, principale ville daccueil de cette diaspora, certains noms iconiques ont disparu (Mamma Leones, Gino, Angelos…), mais dautres, tout aussi anciens, perpétuent la tradition : Raos, Johns of 12th Street, Bamontes, Marios, Patsys…

Parmi les incontournables du menu, le fameux chicken parm — une adaptation de laubergine alla parmigiana mais à base de poitrine de poulet— aligne escalope panée, sauce tomate et mozzarella. Impossible d’évoquer le style red sauce sans parler des fettuccine Alfredo : la petite histoire veut que les stars hollywoodiennes Douglas Fairbanks et Mary Pickford, conquises à Rome par les pâtes enrobées de beurre, parmesan et eau de cuisson chez le restaurateur Alfredo, aient demandé la recette, ensuite déclinée aux États-Unis avec ajout de crème, adaptation oblige. Le dimanche, dans ce restaurant, place aussi à la tradition du Sunday gravy, un mijoté de viandes hérité du ragù napolitain. Sur Netflix, dans le film Nonnas, le personnage incarné par Vince Vaughn cherche dailleurs désespérément à recréer ce plat familial après le décès de sa mère.

  

Ces derniers temps, lesprit red sauce sest exporté, notamment dans la capitale française. Il y a dabord eu Vecchio, fin 2023, avec lex-candidat de Top Chef  Gianmarco Gorni aux fourneaux : un pop-up durablement installé durablement face au succès. Au sixième étage du Perchoir Ménilmontant, nappes blanches, bougies et tables rapprochées recréent le côté « resto de quartier » caractéristique des pionniers du genre. Les boulettes de viande figurent évidemment à la carte, avec pain grillé et sauce marinara, et lon peut même commander des arancini — ces boulettes de riz panées et frites — ici fourrées au cheddar. Pour Baptiste Aubour, consultant spécialiste de la restauration, qui travaille notamment pour Top Chef, imaginant des mécaniques d’épreuves et goûtant la cuisine de près dune centaine de candidats potentiels avant le casting officiel, « cest un peu le combo parfait. Tu ne peux pas être déçu de la cuisine italienne et ça se mêle à lesprit des Américains, rois du divertissement. On a vraiment limé les codes de la restauration italienne en France, et cela permet de lui adjoindre une culture qui la rend encore plus vivante. Cest aussi une manière de créer un langage avec des images mentales : on pense à Little Italy, aux films de Scorsese ; du coup, ça devient sulfureux, et cest ce dont a besoin la restauration festive pour une expérience réussie ».

Et ce nest pas fini, du moins à Paris : cest au tour de Cherry de faire parler de lui. Cette fois, on s’éloigne du « restaurant de quartier » originel : dans ce coin de Saint-Germain-des-Prés, les serveurs portent un nœud papillon et une veste blanche épaisse, et les rigatoni « à la crème citronnée et caviar » sont facturés 89 . Le luxe à l’italienne, ascendant américain, donc.