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Des mots sous le sapin

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Dans notre sélection de cadeaux à offrir ou se faire offrir, un cru 2020 en sept ouvrages de chefs de file et de femmes formidables.

Chemins Croisés
D’Éric Guérin, photographies d’Erwan Balança,
Ulmer éditions, 39,90€

« Nous sommes tous les acteurs de ces parcours de vie qui se croisent et bien souvent s’inspirent », nous écrit Éric Guérin en signant ces beaux Chemins Croisés, son troisième ouvrage après Brière et Migrations, édités à compte d’auteur. Auteur. Voilà un mot qui va bien au magnétique chef de la Mare aux Oiseaux, son « île sur la presqu’île » de Brière où il s’épanouit depuis vingt-cinq ans, soit la moitié exacte de sa vie. « Une étincelle, une minute à peine brûlée en mon cœur étonné. » Dans ce superbe objet dont Pierre Gagnaire signe l’avant-propos et Hervé Bourdon est l’invité (quel portrait !), il met en lumière – fortement aidé par les magnifiques photographies d’Erwan Balança –, ses « piafs » et ses artisans fournisseurs sans qui la baguette du chef ne serait pas aussi magique pour sublimer leurs services et offrandes dans des plats mémorables. Cinquante-cinq d’entre eux sont offerts en recettes, liées aux portraits superbement écrits de ses cueilleurs d’algues, maraîchers, paludiers, éleveurs, artistes, coutelier, apiculteur, producteurs de pommes. « Le message d’autosuffisance » que véhicule la tendance actuelle du « chef à potager » ne lui correspond pas. Il a fait le choix du maillage humain responsable et économique, qui fait ses preuves depuis vingt-cinq ans. Un choix d’auteur.

Le Livre de recettes dont vous êtes le héros
D’Anne Zunino et Antonin Iommi-Amunategui,
Nouriturfu, 15€

Ces deux-lA (comme Anne et Antonin) savent faire des livres. Celui-ci se prête particulièrement à la période de cocooning forcé où l’on arrive à la toute fin des catalogues de streaming. Une lecture ludique en jeu de pistes vers l’antre du Ventre qui nous en apprend de belles l’air de rien, sur nous, sur ce que l’on mange et boit, comment, pourquoi et comment faire tout ça au mieux. Comme le Guide des vins dont vous êtes le héros, il ne se lit pas du début à la fin ou comme un manga, mais au paragraphe. Chacun d’entre eux acculant à un choix qui détermine le paragraphe suivant. Parcours d’une vaillante héroïne : Paragraphe 1 – 18 – 120 – premier faux pas, rattrapé aussi sec, un petit cours sur les nourritures aphrodisiaques, le sésame pour un riz blanc cuit parfaitement, la redoutable épreuve « Nadine de Rothschild », la recette du mi-cuit de Pierre Hermé et… paragraphe 199 et ce satané Svenito pour finir ? Refaire le parcours, sans modération.

Post-Cuisine
De Guillaume Sanchez et Henry Michel, Éditions du Chêne, 39,90€

Dans un autre genre qu’Éric Guérin (Chemins Croisés, Ulmer), Guillaume Sanchez se révèle également un pur auteur. Déjà marqués par Humains, prix Antonin Carême 2017, c’est peu dire qu’on l’attendait ce Post-Cuisine. « Si vous voulez comprendre ce qui s’est passé dans ma tête depuis l’ouverture de NE/SO, tout est dedans. » Il y parle cuisine, produits, technique, sensations, origine, création. Dans un « corps à corps » avec Henry Michel, déjà coauteur d’Humains, et au moyen d’une table de mixage so Sanchez. Un égaliseur de saveurs qui lui permet de « pousser les potards » de la cuisine qui l’anime « et qui m’animera dans le monde d’après », formule qui s’est invitée en cours d’écriture de l’ouvrage via ce virus qui nous pourrit la vie – ou qui nous la révèle, c’est selon – depuis le 14 mars 2020.
En six pistes de saveurs, des « claques et des caresses » sur le goût de l’époque, son savoir global acquis avec les moyens du bord pour une application ultra locale, et une pure réflexion à chaud sur la cuisine de demain (« ce sera une cuisine de réparation avant de se révéler une cuisine d’avenir ») en plein confinement, balancés comme dans les grimoires qui s’épargnaient toute coquetterie, avec une demie-tonne de sublimes illustrations de Cloé Guitton, Guillaume Sanchez a encore frappé. Post-cuisine, il va se passer quoi donc ? « Tous les codes vont exploser ». Il a encore pris de l’avance, lui.

Le Végétal
De William Ledeuil et Chae Rin Vincent, photographies de Laurent Granddadam, éditions de La Martinière, 39,90€

Le Végétal vient compléter les ouvrages précédents de William Ledeuil, les Pâtes autrement et Bouillons, consacrés à la découverte de son univers culinaire, entre ZKG, KGB et Kitchen Ter(re). Tout, dans les ouvrages que William Ledeuil publie aux éditions de La Martinière, dit l’élégance et la cohérence du chef. L’objet lui-même, solide, toilé d’un vert végétal, tout illustré par Louis Laurent Grandadam, qui maîtrise son Ledeuil comme personne… Le Végétal passe en revue toutes les familles de végétaux, des asperges aux algues en passant par les champignons et les aromatiques, ces merveilleuses qui exacerbent l’intuition et la délicatesse dont fait preuve William Ledeuil quand il s’agit d’imaginer condiments et assaisonnements qui touchent toujours juste.

Aux Terrasses
De Jean-Michel Carrette, avec Stéphane Méjanès, photographies de Matthieu Cellard, 38€

Il s’ouvre par une jolie conversation avec Michel T., from Roanne, le père spirituel, auprès duquel il est en apprentissage quand le sien propre décède brutalement et précipite l’avenir de Jean-Michel. Qui rentre à la maison, prend son temps, une valeur cardinale chez les Carrette, et modèle les Terrasses à sa main avec Amandine, « précis, libre, réfléchi et spontané » dans sa cuisine, pendant qu’elle soigne les contours de l’accueil et veille aussi efficacement que discrètement au bien-être de tous, ceux qui reçoivent et ceux qu’ils reçoivent.
L’ouvrage se décompose en quatre grandes parties avant d’attaquer les recettes, qui se démarquent des autres façon Chapel (« La cuisine, c’est beaucoup plus que des recettes »). Pas de fiches classiques, de grammages et autres tours de main, tout juste cède-t-il le secret de ses condiments, marqueurs du style Carrette. Au cœur, comme un symbole, il parle avec sincérité de tous ceux sans qui il ne délivrerait pas ses ablettes en friture, sa volaille de Bresse sublimée à la morille et à l’ail des ours, son sandre ikéjimé en pochouse… Le livre s’achète en ligne ou sur place.

Des recettes qui tranchent, le carpaccio
D’Anne Etorre, illustrations d'Alessia Serafini,
les Éditions de l’Épure, 18€

Anne Etorre a quelques dadas gourmands, et le carpaccio tient en bonne place en haut de sa liste. Elle donne dans ce merveilleux petit ouvrage poétiquement illustré par Alessia Serafini, juste ce qu’il faut de conseils et de bons gestes et trente de ses associations toutes personnelles pour qu’on arrive à la cheville de ce qu’elle réalise et publie sur ses réseaux sociaux en matière de plats bien slicés et spicés. Faites comme elle, laissez vivre vos envies et ayez l’œil ouvert sur le produit.

L'Esprit Chapel
De Suzanne Chapel, Laurent Feneau et Alexandra Michot, Hors Collection, les Éditions de l’Épure, 35€

« Chapel inspire aujourd’hui peut-être plus que jamais ; pour sa cuisine bien sûr, mais également par l’humanité qui sous-tend tout son travail, que celle-ci s’applique à son équipe, à sa clientèle ou encore à ses fournisseurs. » Le témoignage – dont l’ouvrage est truffé – est de Pierre Gagnaire. Alain Chapel avait une longueur d’avance sur tout le monde d’aujourd’hui. Il a « réinventé » la cuisine, le lieu, le service, le management, avant tout le monde. Déjà moderne, contemporain, dans les années 70-80, quand on allait à Mionnay comme on entre en religion, goûter, se nourrir d’Alain Chapel, que l’on soit client ou professionnel. Un des rares chefs à faire l’unanimité, qu’on l’ait connu ou pas, goûté ou pas. De son vivant ou depuis sa mort brutale, à 52 ans, le 9 juillet 1990. Un maître technique, auteur d’un unique livre (La cuisine, c'est beaucoup plus que des recettes), concentré sur le produit et son environnement, locavore, écoresponsable de la première heure, respectueux de la saisonnalité, qui a marqué par la rupture esthétique et stylistique qu’il a opéré à Mionnay et dans le paysage culinaire français. Sous la plume de Laurent Feneau, avec les archives de Suzanne Chapel, et l’apport conséquent d’Alexandra Michot pour les entretiens et la construction du livre, L’Esprit Chapel est édité par Sabine Bucquet-Grenet, des éditions de l’Épure, qui font donc coup double dans notre sélection.
Cet ouvrage regorge des fameux petits papiers d’Alain Chapel, ces notes manuscrites qui, le confie sa veuve, « faisaient partie de son mode de fonctionnement ». Jusqu’à rechercher un graphiste pour calligraphier sa carte des vins devenue livre de cave. Le vin et Chapel, un lien tissé par des expériences, des dégustations et des rencontres… « Un langage qui pourrait bien apprendre aux êtres humains s’ils n’y prenaient garde, à communiquer entre eux », disait-il. Encore un regret pour qui n’a pas connu les mythiques repas de vignerons qu’impulsait le cuisinier, ses accords mets-vins restés dans les mémoires des heureux et qui le jalousent d’avoir eu comme copains de la première heure et de toujours comme Jules Chauvet, les précurseurs du nature en Beaujolais, ou encore Pierre Overnoy.

Chassez le naturel #3
De Pauline Dupin-Aymard, Les Éditions qui piquent, 16€

Le cadeau le plus frais. Il est tout juste paru, pile au bon moment. Tellement pile qu’à l’heure de vous délivrer ces lignes, on l’attend encore fiévreusement comme les deux précédents. Et si on vous le conseille à l’aveugle, c’est parce qu’on connaît la qualité de ce que délivre Pauline Dupin-Aymard, à qui on a demandé de nous écrire des instantanés de son itinéraire pour Omnivore.com. Ses Carnets sont à lire (c’est toujours joliment écrit à fleur de peau), à voir (c’est beau, Céline Ros), à boire évidemment. Car Pauline Dupin-Aymard goûte, beaucoup avec le cœur, pas mal avec intuition, toujours en connexion presque viscérale avec les vignerons à la rencontre desquels elle va. « C’est mon regard, singulier et subjectif, le vin par le voyage et le paysage, le vin de l’instant, le vin qui raconte des histoires, celle de la terre, des gens, et du temps », écrit-elle à ses lecteurs. Dans ce #3, Pauline nous balade avec ses mots chez Patrick Meyer et au domaine de la Paonnerie entre autres. Commandez ici, et complétez votre collection, le #1 vient d’être réimprimé.

Par Audrey Vacher

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