BO&MIE : Le beau de la mie
Par Rémi Héluin
(c) BO&MIE / Illustrations par Lou Rihn
BO&MIE, cinq lettres et une grande ambition. En moins de huit ans, l’enseigne a pénétré le cercle fermé des grands noms de la boulangerie parisienne. Crée sous l’impulsion de Magali Szekula et Jean-François Bandet, cet acteur nouvelle génération participe à renouveler en profondeur les codes de la filière, tout en défendant son indépendance et son attachement à des produits entièrement artisanaux. Coffeeshop XXL ou lieu de snacking convivial, le concept est aussi hybride qu’ouvert à de nombreuses implantations, en France comme à l’étranger.
Comment passe-t-on des sports de combat à la boulangerie ? Rares sont ceux pouvant répondre à cette question. Jean-François Bandet est de ceux-ci. Fondateur de la marque Venum, vendue en 2015, l’entrepreneur s’est réorienté vers l’univers de la gourmandise par goût personnel. « J’avais envie d’entreprendre à nouveau dans un domaine qui me parlait, c’est le cas du sucré et de la boulangerie », se souvient-il. Il se forme alors au sein de l’école Ferrandi, puis réalise des stages chez Maison Landemaine et Utopie : « On ne devient pas un grand boulanger en quelques mois, mais il s’agissait du minimum pour comprendre le marché, être crédible et ne pas arriver en terrain conquis. » Il rencontre dans ce parcours sa future associée, Magali Szekula, uneancienne juriste. BO&MIE voit le jour quelques mois plus tard, en novembre 2017, dans le 2e arrondissement de Paris. « À l’époque, nous étions peu nombreux sur le segment de la boulangerie premium, repensée pour s’adapter aux goûts de l’époque », analyse le dirigeant, qui a fait le pari de repartir d’une feuille blanche à chaque ouverture d’établissement.
Développement accompli
Deux ans seront nécessaires pour voir la marque prendre de l’ampleur. « Le développement était un projet dès le départ, un rêve, on ne savait pas si on en serait capables ! », sourit celui qui est désormais à la tête d’un réseau d’une dizaine de points de vente (dont trois à l’international), en plus des corners en entreprise. Louvre, Saint-Michel, Hôtel de Ville, Grands Boulevard… la marque s’implante dans des lieux passants — ces fameux « emplacements nº1 » — et partage avec une clientèle très cosmopolite, allant du Parisien au touriste en passant par les travailleurs, un fort attachement à la tradition boulangère : « Nous avons fait le choix de grandir en fabriquant tout maison. Cela a impliqué d’investir dans un laboratoire de 2000 m², installé à Clichy (Hauts-de-Seine) et en service depuis le printemps 2024. » Un chantier de centralisation qui a permis d’améliorer la qualité des produits — en retravaillant des classiques tel que le croissant, le flan ou les cookies — autant que les conditions de travail des équipes. Cela a néanmoins impliqué de perdre l’appellation « boulangerie » pour plusieurs boutiques, comme l’assume Jean-François Bandet : « Nous avons plus de dix boulangers mais le fait que nous ne fabriquions plus le pain sur place ne permet plus d’affirmer ce mot sur nos façades. Aujourd’hui, exploiter des boulangeries en plein Paris est devenu complexe, du fait des difficultés de livraison, de recrutement ou encore des problématiques de copropriété. »
Indépendance
Avec une structure bien huilée, l’entreprise dispose désormais des moyens de ses ambitions, tout en capitalisant sur son indépendance. « Depuis le départ, nous avons souhaité nous développer sans recourir à des levées de fonds, ce qui nous a permis de maintenir notre stratégie de long terme au service de nos clients et collaborateurs. De plus, cette approche permet d’éviter le piège d’un plan de marche pré-écrit, qui pourrait nous orienter sur des emplacements moins performants », défend le chef d’entreprise. Cette liberté lui permet aujourd’hui d’investir dans la montée en gamme de ses boutiques : « Jusqu’à présent, nous avions tout réalisé en interne, de l’aménagement des points de vente à la communication. Désormais, l’enjeu est de proposer des espaces plus soignés, comme nous l’avons fait dans notre boutique des Grands Boulevards, ouverte récemment, grâce à l’expertise de partenaires sélectionnés. Design, toilettes, climatisation, chaque détail est scruté par des clients toujours plus exigeants. » Cette dynamique doit permettre à l’enseigne de poursuivre son développement en attirant des partenaires en France comme à l’étranger : gares, aéroports, entreprises, franchises internationales comme à Dubaï ou en Corée du Sud, où BO&MIE est présent. Autant d’axes qui ne font pas perdre le cap à l’entrepreneur : « Nous continuons à ouvrir à Paris en propre, à raison d’une boutique par an. Je n’ai pas le sentiment qu’il faille être le plus gros du marché pour vivre ! Mon objectif est de continuer à faire ce que nous avons dessiné depuis le début : bien accueillir les clients et leur offrir des produits aussi bons qu’accessibles ». Le bon, le beau, l’amour des mies et des amis. De quoi résumer la démarche de cette enseigne à fort potentiel.