Avec leurs « cafés », les enseignes partent à l’assaut des centre-ville… et de la pause déjeuner des urbains
Les enseignes internationales autant que les boulangers indépendants installés au cœur des villes doivent désormais compter sur de nouveaux concurrents. Un temps cantonnés aux fameux « ronds-points », les réseaux de nouvelle génération, nés il y a une vingtaine d’années, entendent désormais multiplier les formats et profiter de l’intérêt des consommateurs pour l’atmosphère « coffee shop ». Ange, Marie Blachère, Feuillette, Paul, Maison Bécam et même Monoprix, autant de noms sur lesquels il faudra compter pour la pause café… et bien plus.
"Je veux désaméricaniser le coffee-shop.", sourit Jean-François Feuillette. Avec une phrase simple, le boulanger-pâtissier aux 83 points de vente cible directement les mastodontes du secteur, dont les codes trahissent leurs origines. Le Coffee-shop à la française, voici le nouveau terrain de jeu des étoiles montantes de la boulangerie. Avec son concept Café Feuillette, implanté à Tours (Indre-et-Loire) depuis août 2024 et plus récemment à Limoges (Haute-Vienne), l’enseigne reprend les codes qui ont fait son succès… avec un format miniaturisé et des gammes resserrées, mettant de côté le pain. Viennoiseries, pâtisseries et mets salés (sandwiches, salades, soupes…) se déploient sur 240 m2, contre près de 600 m2 pour les implantations en périphérie. Les boissons chaudes, qui représentent près de 30% de l’activité, ne sont pas en reste. Des propositions gourmandes, chaudes ou froides, viennent accompagner le traditionnel café.
Un format efficace, rentable et plus facile à déployer

Feuillette n’est pas la première enseigne à se lancer sur ce positionnement particulièrement stratégique. Non seulement ce format s’invite au plus près du consommateur, accentuant mécaniquement la visibilité de la marque, mais il offre aux partenaires franchisés l’opportunité de déployer des points de vente avec un investissement contenu. Le fait n’avait pas échappé au Groupe Blachère, qui a débuté les expérimentations autour de son « Café Marie Blachère » dès 2020. Centre-ville, gares, aéroports, aires d’autoroute ou encore stations-service : sur 100 à 200 m2, la petite sœur de Marie fait la part belle aux produits en libre-service et entend capter le public sur l’ensemble de ses déplacements.
Même logique du côté du Groupe Holder, qui a décliné son enseigne phare Paul en version Café, dont le développement s’est d’abord opéré à l’international avant d’accélérer en France.
Avec le cap des 50 unités franchi l’an passé, Paul le Café incarne le renouvellement d’une enseigne iconique de la restauration rapide à la française… tout en continuant à en porter les emblèmes, à l’image du croissant, dont l’association avec les boissons chaudes est toute trouvée.
Ange, Maison Bécam, Monoprix… coup de chaud pour le développement des cafés

Pour la clientèle, cette tendance représente une option solide pour la pause déjeuner. Elle bénéficie de l’image-prix accessible de la boulangerie tout en proposant un cadre moderne, avec des recettes variées et évolutives au fil des saisons… et concurrencent autant les acteurs traditionnels du snacking, à l’image des spécialistes du burger, mais également les artisans indépendants, acteurs historiques de la « petite restauration » de centre-ville.
Ils devront compter demain sur de nouveaux entrants, dont certains déjà bien connus dans le secteur de la boulangerie en réseau. Ange Coffee, rattaché à la fameuse enseigne attachée à son auréole, entend faire voler son pélican sur de nouvelles contrées, après avoir posé ses ailes à Narbonne (Aude) à l’été 2023. « Cette première implantation nous a permis d’adapter le concept, avant de le déployer prochainement à Salon-de-Provence (Bouches-du-Rhône) puis dans l’Ouest de la France. », précise Mélanie Kervoern, directrice marketing et communication chez Ange. Du côté de Maison Bécam (28 boulangeries), les deux fondateurs Cécile et Nicolas ont récemment dévoilé leur projet de « Bécam Café », sans annoncer de projet d’ouverture concret à date.

Tout ceci pourrait bien n’être que le début de l’histoire du juteux marché de la « coffee bakery » au cœur de l’Hexagone. Les grandes enseignes de distribution témoignent d’un intérêt certain pour cette activité, qui pourrait prendre place au cœur de leurs espaces de vente. Monoprix a débuté courant avril le déploiement de son concept « Cantine », au sein de ses magasins de Colombes, Neuilly-sur-Seine (Hauts-de-Seine) et Paris-Beaugrenelle. Pâtisseries signées Noëmie Honiat, sandwiches garnis de jambon Prince de Paris et de fromages sélectionnés par Christophe Fromager, cafés de spécialité préparés par un barista… autant d’éléments qui reprennent les codes du fameux coffee shop à la française. Philippe Palazzi, directeur général du Groupe Casino, auquel est rattachée l’enseigne de distribution urbaine, entend porter l’idée avant la fin de l’année dans 10 autres magasins en Ile-de-France et en région… avec une ambition forte : réaliser à terme la moitié de son activité avec la restauration. Après les ronds-points, la concurrence n’a définitivement pas fini d’animer les centres-villes.