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Cookies, muffins, cheesecakes, donuts… : la pâtisserie américaine fait son trou dans le paysage français

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Texte par Rémi Héluin

Photo de couverture par Erlian Zakia

Au sein des vitrines sucrées, le métissage des saveurs et des textures n’a de cesse de s’étendre. Pourtant, la forte identité pâtissière française aurait pu laisser présager de plus vives oppositions : cookies et muffins sont devenus, en moins de 40 ans, des classiques de la pause gourmande dans l’Hexagone. Le lien entre la culture américaine et le vieux continent continue de se tisser, porté par les réseaux sociaux et de nouvelles générations avides de découvertes culinaires, leur offrant la possibilité d’un voyage immobile. Une opportunité sur laquelle comptent bien capitaliser les promoteurs du donut, toujours plus nombreux dans nos contrées. 

« Avant notre ouverture, le 6 décembre 2023, on m’a fréquemment expliqué que le donut n’avait pas de marché en France », s’amuse Alexandre Maizoué, Directeur Général de Krispy Kreme France, rattaché à Wagram Food Service. Force est de constater que la marque, née en 1930 aux Etats-Unis, a déjoué tous les pronostics en se plaçant dans le « ventre de Paris », en plein cœur du Forum des Halles : « Nous avons réalisé 1 million d’euros de chiffre d’affaires sur nos 24 premiers jours d’activité, au-delà de toutes nos espérances ! » Depuis, l’épopée du donut se poursuit dans des territoires pourtant bercés par des recettes emblématiques, à l’image du croissant, de l’éclair ou encore du baba au rhum.  

Il emprunte une voie déjà tracée par des produits tels que le cookie. En 2022, près de 28 000 tonnes de cette recette typiquement américaine se sont écoulées en France (source Statista), s’imposant comme un poids lourd du marché du biscuit. Les spécialistes se sont multipliés dans les rues et lieux de passage tels que les gares et centres commerciaux : Laura Todd, La Fabrique Cookies, Millie’s Cookies, … autant de noms bien connus des amateurs, qui se développent pour la plupart en franchise sur notre territoire pour pénétrer une large typologie d’emplacements, allant du lieu de transit au centre-ville. 

 La Fabrique Cookies se déploie en France avec 22 points de vente, comme ici dans le quartier d’affaires de La Défense (Hauts-de-Seine). Ces boutiques monoproduit témoignent de l’implantation réelle du cookie dans les habitudes des Français. 
© La Fabrique Cookies 


Les Etats-Unis, une source d’inspiration, même pour les plus grands chefs 

 

Si les muffins et brownies accompagnent eux aussi de nombreux instants gourmands, ce sont sans doute les cheesecakes qui ont été les plus largement adoptés par les chefs pâtissiers français de renom, à l’image de Pierre Hermé. A l’occasion des sélections Americas de la Coupe du Monde de la Pâtisserie, cet emblématique créateur sucré, qui est aussi président de la compétition, n’hésitait pas à décrire les Etats-Unis comme « une des plus importantes places de la pâtisserie mondiale, d’où sont originaires bon nombre de desserts devenus populaires et consommés dans le monde entier ». Dans les boutiques de sa Maison, le cheesecake se pare de multiples saveurs : orange-fruit de la passion, rose-framboise-litchi, pistache-griotte… Des interprétations raffinées qui font dialoguer l’univers du chef avec les textures et saveurs nées outre-Atlantique. Certains se sont fait une spécialité de faire vivre cette créativité autour du produit, à l’image de Jonathan Jablonski, à la tête de l’enseigne Factory & Co, qui a développé plus de 15 déclinaisons de ce gâteau crémeux. 

 Le cheesecake se décline dans de multiples parfums, comme ici chez Factory & Co.
© Factory & Co 


Un morceau de pop culture américaine à croquer 

 La boîte de 12 donuts, un des formats emblématiques de l’enseigne Krispy Kreme pour un moment de plaisir à partager.
© Krispy Kreme 


En réalité, ces pâtisseries ne font pas que nourrir le corps : elles touchent également l’esprit. « Nous ne sommes pas simplement des vendeurs de donuts, mais participons à apporter un peu de pop culture américaine dans le quotidien de notre clientèle », décrit Alexandre Maizoué. Le dirigeant n’hésite pas à décrire une « génération Netflix », abreuvée de contenus où le gâteau rond est omniprésent. Malgré le caractère iconique de la marque et la notoriété mondiale du produit, cela n’empêche pas les spécialistes du donut de devoir mener un vaste travail d’évangélisation. Il semble ainsi, pour l’heure, difficilement concevable de voir le produit consommé au petit-déjeuner en France, là où la pratique est courante chez les Américains. L’arrivée de nouveaux acteurs, tels que Dunkin’ (qui a inauguré deux points de vente à Paris en mai 2025), ou la croissance d’enseignes portées en franchise comme Donuts & Donuts, Royal Donuts, Dreams Donuts…, participent à donner de la visibilité à la catégorie… masquant cependant de réelles disparités entre les positionnements de chacun. « Le donut a une image de produit industriel. Trois gros faiseurs concentrent l’essentiel des volumes. Nous défendons à l’inverse un produit frais du jour, fabriqué au sein de notre propre atelier, qui est distribué dans nos 22 points de vente mais également dans les armoires que nous déployons en grande distribution, au travers d’un premier partenariat avec Franprix », rappelle le directeur général de Krispy Kreme France. Cette vision du « donut frais » à la texture singulière, en opposition avec les références surgelées, est également défendue par Dawn Foods, qui commercialise des ingrédients permettant aux spécialistes du sujet comme à des artisans boulangers-pâtissiers et restaurateurs de s’en emparer. Cette préparation serait ainsi accessible aux professionnels en moins de trois heures d’apprentissage, le seul point bloquant étant l’investissement dans du matériel de friture le cas échant. Cependant, cette diversification pourrait leur ouvrir les portes d’un juteux marché : selon les industriels, la croissance de consommation sur la catégorie devrait atteindre près de 10% par an. 

National Donut Day, Pac-Man et Nutella 

Pour repousser les limites du déploiement de ces gourmandises qui défient les recommandations nutritionnelles, la clé pourrait bien être de miser sur les événements et le renouvellement permanent. Tous les ans, le premier vendredi de juin -ce vendredi 6 juin 2025- est fêté le « National Donut Day », soit la Journée Nationale du Donut, aux Etats-Unis. L'évènement est devenu planétaire au fil du déploiement du donut. Imaginée par l'Armée du Salut de Chicago en 1938, la fête rendait hommage aux pâtissières ayant préparé des donuts pour les soldats pendant la Première Guerre Mondiale, puis pour les personnes dans le besoin pendant la période de la Grande dépression. « Si notre référence phare est le donut Original Glazed, qui est un produit unique, nous apportons de la joie et de la couleur dans nos vitrines avec des éditions limitées toutes les sept à dix semaines », détaille Alexandre Maizoué. Dernière opération en date, une collaboration avec Pac-Man. Autre effort indispensable, l’adaptation. Le traditionnel fourrage de chocolat-noisettes a été remplacé par du Nutella en France, pour apporter de la réassurance.  

Face à ce qui pourrait ressembler à une vague sucrée américaine, des craintes de submersion se développent chez les boulangers et pâtissiers français, attachés à l’identité culinaire nationale. Pourtant, grâce à la diversité des instants de consommation -qui ne cessent de se multiplier-, chaque catégorie de douceurs conserve encore sa place : un client fidèle chez Krispy Kreme génère en moyenne trois visites… par an. Alors que l’enseigne a vendu 5 millions d’unités en 2024, elle ambitionne d’en écouler le double cette année, et vise les 50 millions au travers de 500 points de contact (boutiques physiques et armoires en grande distribution) d’ici à 5 ans. En comparaison, ce sont 1,8 milliards de croissants qui avaient été consommés en France en 2021. Le donut aura donc encore à creuser son trou face à ce mastodonte.  

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