Par Jean-Pierre Montanay
« La Man’ouché, c’est comme une pizza mais avec une pâte très fine et plus légère » et il sait de quoi il parle, Alan Geaam, seul chef libanais étoilé de France, lorsqu’il évoque cette galette qui lui rappelle son pays natal. Il faut voir la foule qui se presse au Faurn, autrement dit le four, l’un de ses restaurants parisiens entièrement dédié à la confection de cette galette. Une consécration pour ce plat simplissime et bon marché, mondialement reconnu depuis son entrée en 2023 au patrimoine immatériel de l’Unesco aux côtés par exemples du ceviche et de l’Opera lyrique italien. Au Liban, la Man’ouché, est née dans les montagnes, où, faute de boulangerie, elle était préparée à la maison par les femmes. Recette simplissime avec une pâte à base d’eau et de farine, recouverte d’ingrédients issus de la cueillette comme le zaatar (thym ou origan) et le sumac puis cuite une trentaine de secondes, le plus souvent dans un four à pain chauffé à 400°. Avec l’exode rural dans les années 1950 et 1960, les paysans de la montagne ont quitté leurs villages pour s’installer dans les grandes villes côtières, emportant avec eux la Man’ouché, devenue le plus populaire des petits déjeuners. Totem identitaire de cette riche cuisine du pays du Cèdre, la galette a ensuite conquis le monde à mesure de l’essor de la diaspora libanaise. Aujourd’hui, dopée par l’appétit pour la street food, cette pizza orientale est proposée dans la plupart des tables libanaises et sur les marchés. Si la classique reste la version la plus simple au zaatar, la Man’ouché s’est embourgeoisée avec des garnitures plus riches à base de halloumi, de labné, d’œuf, ou encore de viande d’agneau épicée.