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Pêche européenne : la senne démersale toutes voiles dehors

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C’est l’histoire d’un jeudi d’espoir transformé en jeudi noir, à cause de la senne démersale, technique de pêche dévastatrice, passée entre les mailles du filet européen. Explications. 

Senne des mers sales ? Le jeu de mots aurait pu faire mouche, mais ce ne sont pas la Manche et la mer du Nord qui sont sales. En revanche, on n’est dans le vrai concernant la démersale, dérivé du latin demersus (de demergere, qui signifie « plonger »), cette technopêche à haute intensité qui racle les fonds marins et qui occupe une soixantaine de bateaux dans les eaux côtières de Normandie et des Hauts-de-France. 
Interdite sur une grande partie de la façade atlantique, elle reste donc autorisée dans la Manche et en mer du Nord. C’est officiel depuis le jeudi 29 septembre quand, à l’issue de la réunion du trilogue (Parlement, Conseil et Commission UE) tenu à Bruxelles, l'amendement à l'article 5 de la Politique commune de pêche (PCP), concernant l'accès des eaux territoriales à d'autres États membres, pour la durabilité des ressources halieutiques et la sauvegarde du modèle de pêche artisanale français, et proposé par l'eurodéputée EELV, Caroline Roose, a été rejeté.

 

 


Un « abandon » de l’État pour les ONG, indéfendable selon un eurodéputé de la majorité parce que mal formulé, discriminatoire même, puisque l’interdiction vise en particulier les Pays-Bas. Et pour cause : dans la Manche, 54 navires, dont une quarantaine battant pavillon néerlandais, pratiqueraient la senne démersale, selon l’association de préservation des océans Bloom. Une remontée d’informations recueillie auprès du comité des pêches des Hauts-de-France indiquait que 98% des pêcheurs concernés sont opposés à cette technique. Tribunes de parlementaires, pétition de Bloom à 50 000 signatures… rien n’y a fait.
Pour Bloom, « ce combat » est emblématique. « On est sur un sujet tout à fait similaire à celui de la pêche électrique (interdite en France depuis 2018 et en Europe depuis l’été 2021, ndlr), on est sur les mêmes acteurs. On a des industriels qui ont développé une technique super efficace et qui viennent dans des zones vulnérables, fragiles. »

Adieu rougets barbet, grondins perlon, barbues et turbots !

Pour rappel, cette technique de pêche aussi appelée senne danoise ou écossaise, est apparue à la fin des années 2000 après l’interdiction de la pêche électrique. Elle consiste à encercler les poissons dans des filets dérivants en les empêchant de s’enfuir grâce à des câbles vibrants. « La technique est dévastatrice quand elle est faite par de gros navires industriels », dénonce Olivier Leprêtre, président du Comité régional des pêches des Hauts-de-France, lui-même senneur d’un bateau de 19 mètres, « et pas de 35 mètres comme les Néerlandais. Quand tout est multiplié par trois ou quatre, ça devient dévastateur», explique à Libération le senneur repenti, qui a appuyé la demande d’interdiction. Ça ratisse large – sur 2,5 km2 en une prise, et 5 à 10 fois plus en volume de prise – et sans discernement – pour faire simple : tout ce qui n’est pas soumis à quota, les encornets, les langoustines… et adieu rougets barbet, grondins perlon, carrelets, soles, limandes, barbues et turbots !

Après la mobilisation des pêcheurs britanniques et de Greenpeace UK avec les côtiers français au milieu de la Manche en mai dernier, le ministre de l’Environnement britannique a lancé une consultation publique au sujet de la senne démersale. Une interdiction au Royaume-Uni allumerait une nouvelle lueur d’espoir pour la pêche durable, sociale, et la biodiversité dans les eaux européennes. À suivre.

Audrey Vacher

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