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Manon Santini : la pizzaiola qui fait lever Monaco

Le 17 July 2025

Championne du monde de pizza sucrée, cette native des Bouches-du-Rhône a le potentiel d’une star bien au-delà du Rocher.

Championne du monde de pizza sucrée, cette native des Bouches-du-Rhône a le potentiel d’une star bien au-delà du Rocher.

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A seulement 29 ans, Manon Santini maîtrise mille choses – entremets sculptés, flans tricolores, éclairs aux airs de vases japonais –, pourtant ce sont ses pizzette sucrées qui la propulsent aujourd’hui sur le devant de la scène. Prenez celle aux fraises de plein champ : pâte longuement maturée, compotée de fruits rouges, cerises croquantes, amandes fraîches et surtout ce tourbillon de crème inspiré du Meilleur Ouvrier de France pâtissier Yann Brys. Résultat : un vortex hypnotique rappelant les gâteaux couture tout en conservant la convivialité d’une part de pizza que l’on déchire à la main. La même esthétique se décline sur sa « choco-gianduja », disque noir brillant garni de praliné noisette, tellement viral que le groupe de restaurants Bagatelle l’a ajoutée à toutes ses cartes, dans sept pays. Lorsqu’elle publie la création sur son compte Instagram, les compteurs s’affolent : 120 000 vues. 

La Madame « sucré » du groupe Bagatelle 

Depuis 2020, Manon Santini est la cheffe pâtissière du groupe fondé par Rémi Laba et Aymeric Clemente. Dans les coulisses, elle conçoit œufs à la neige en forme d’étoiles, tartes-pétales au chocolat au lait ou dômes de yuzu qui éclatent sous la cuillère. Des desserts spectaculaires, instagrammables et calibrés pour voyager de Dubaï à Saint-Tropez sans perdre en précision ; on les sert désormais dans sept pays. Pour tester ses idées en direct, la cheffe a lancé en 2024, avec l’Italien Rocco Seminara, le restaurant éphémère Zia au sein de l’hôtel Métropole à Monaco, lequel accueille aussi le prestigieux restaurant Les Ambassadeurs** dirigé par Christopher Cussac, longtemps lieutenant de Joël Robuchon. C’est ce dernier qui a fait appel au duo Santini-Seminara. « La tante » ne devait durer qu’une saison, pourtant le concept se poursuit dès que les beaux jours arrivent, et les habitués réservent le dessert dès la confirmation de table. 

Cuisson capitale et experts napolitains 

« On a tellement d’ambition pour ce produit (la pizza) », revendique Manon Santini au téléphone, ajoutant que la cuisson d’une pizza est aussi complexe que celle d’une viande haut de gamme, quand bien même il s’agit d’un simple mélange d’eau, de sel et de farine. La pâte à pizza de Manon et Rocco réunit trois farines différentes, ainsi qu’un mélange de graines pour certaines versions, d’où une pâte à la fois très légère et très croustillante. C’est pourtant la cuisson qui fait tout, ou presque, comme nous l’avait confié un expert capable de réaliser des merveilles même avec « un pâton minable ». À Naples, berceau de la pizza, les initiés savent qu’au même niveau que le pizzaiolo, celui qui détient les clés d’une pizza d’exception est le fornaio, maître du four qui connaît sur le bout de sa pelle les nuances de la flamme et les caractéristiques de chaque type de bois placé à l’intérieur. 

Un air de famille 

La gastronomie en général, et la pizza en particulier, lui ont « toujours plu », confie Manon Santini. Et pour cause : elle a grandi dedans. Son papa, Serge, l’a précédée sur le chemin des fourneaux, officiant comme chef de cuisine pour le groupe Accor avant d’ouvrir … son camion-pizza en 2017. C’était dans le village de Châteauneuf-le-Rouge, à l’enseigne « Pizzas du Cengle – Chez Sergio », qui continue de régaler les habitants, y compris à coups de bugnes ou de crêpes parfumées à l’orange et au rhum selon la saison. Vous avez dit famille de becs sucrés ? Après le lycée hôtelier de Bonneveine à Marseille (rebaptisé récemment Jean-Paul Passedat, en hommage à l’ancien patron de l’hôtel-restaurant Le Petit Nice, décédé en 2022, et père du chef Gérald Passedat), Manon va muscler son CV : ici chez Bruno Oger, sur la Côte d’Azur (deux astres au Guide rouge et maestro des dîners d’ouverture du Festival de Cannes), là au Plaza Athénée à la grande époque de Christophe Michalak, qui a permis aux pâtissiers de palace de devenir de véritables célébrités. 

©LeaGil

Un concept à dupliquer ailleurs 

Quand Manon Santini remporte l’une des épreuves de la Pizza World Cup à Rome en 2019 avec une pizza aux agrumes et au poivre Timut, elle est identifiée comme une grande dame de la pizza. Elles ne sont pas nombreuses ; citons Marthe Brejon, du Centre Culturel à Paris (qui pétrit ses pâtes à la main et est actuellement en résidence à la Villa Médicis, à Rome). Il faut dire que le milieu de la pizza est encore assez conservateur, davantage même que celui de la haute gastronomie, qui n’était déjà pas le meilleur élève en la matière. En Italie, même dans les très grandes villes, il est encore courant de voir des pizzerias recruter uniquement des hommes… « Nous mettons notre identité, ce qu’on sait faire et ce que nous avons appris pendant des années, au service de la pizza », indiquait en 2024 Rocco Seminara au média Monaco Hebdo, ajoutant vouloir dupliquer le concept Zia dans d’autres destinations que Monte-Carlo. A quand Paris ? 

Par Pomélo