Ainsi Fontaine, cave en ligne drivée par trois femmes, alliant esthétisme, compétences et expérientiel, est née en plein chaos entre confinement et fermeture. Longue vie.
« Ah ! Encore un modèle concurrent », bougonne, rieur, un caviste réputé du XXe arrondissement de Paris, qui, déjà, se démarque par rapport à ses collègues « en dur », quand on aborde le sujet de la remise en question des modèles économiques des cavistes par temps de pandémie. « Faut voir. » Voyons voir Ainsi Fontaine, tiens. Une cave en ligne née sous covid, délestée de quelques frais fixes et fonciers par la grâce de la toile.
Drôles de dames
« C’est la cave en ligne de trois drôles de dames », nous raconte leur site. Des dames drôles en tout cas, qui sont arrivées comme un symbole pour les fêtes de fin d’année. Qui proposent de déguster le vin autrement, « bien, beau et sain ». Qui veulent, elles aussi à l’image des chefs avec leurs artisans et fournisseurs, mettre en avant leurs « superproducteurs », les vignerons et acteurs du vin victimes collatérales des ouvertures et fermetures sporadiques mais prolongées des restaurants, bars et caves.
Pour le « sain », demander Lila, la chasseuse de vins. Volubile consultante en création de restaurants, elle conçoit des menus et des cartes de vins, et propose des formations portées sur l’anti-vin conventionnel. Traduisez un tropisme certain pour le vin nature et sans intrant. Une femme de l’ombre comme Omnivore les aime, au point de la mettre en lumière dans la 14e édition de son Foodbook en compagnie de quatre autres fortes têtes de la food. Elle aime les vins étonnants, d’auteur.e.s.
Pour le « beau », demander Florie. Elle est la palette graphique, la direction artistique de la cave en ligne. Photographe de profession, elle met en scène le (vin) vivant, et les arts de la table, en chinant des objets et en travaillant la lumière, la matière et la couleur. Elle aime le fruit rouge et la syrah.
Pour le « bien », demander Vanessa, « la multi-facette du clan », juriste dans l’industrie musicale et hypnothérapeute. Ainsi, elle s’occupe du commercial et du juridique, mais aussi des émotions autour du vin. Elle aime les vins puissants, « de papa ».
En magasin
Trente références à l’affiche pour démarrer, disponibles en click & collect et en livraison, éthique avec les vélos cargo de Diligo pour Paris et proche banlieue. Toute la gamme du Vin des Potes, Antocyâme, Grange Tiphaine, Grange aux Belles, Clovallon, les frères Ledogar, Sébastien Riffault… mais aussi quelques raretés comme Gabrio Bini ou le Je t’aime de Cyril Alonso –, agrémentées de deux sélections mensuelles de 6 bouteilles, l’une baptisée Fonfon, composée de quilles à petits prix (compter 75€ les 6) pour toute occasion et une un peu plus pointue, nom de code « Ainsi Fontaine », élaborée pour un moment de vie, une émotion ou un thème découverte.
La Saint-Valentin, par exemple, leur a fait appairer un quatuor de quilles baptisé I love Val ✕ Val is dead, histoire de couvrir toutes les configurations. Pour le Nouvel An, Ainsi Fontaine nous conseillait le bien nommé Coup de boule, de la Grange aux Belles, un gamay en pressurage direct, fermentation en bouteille, élevage sur lattes pendant sept mois. « C’est sec et droit, avec une bulle très fine, parfait pour l’apéro, pour un wine time (contre-pied du tea time) ou pour faire la fête. » Sa traduction concrète du « vin à moment ».
Déguster en IRL
Car c’est bien un vocabulaire du vin que veulent partager les drôles de dames. Le leur, à leur façon, forcément différente de celle des quelque 5 000 cavistes traditionnels que compte la France. Parce qu’elles gravitent autour de la table et des vignes, nos trois amatrices de bon ont pu constater que l’expérience autour du vin –surtout autour des vins natures, vivants ou en biodynamie – est un marché vaste à conquérir pour mieux le proposer.
Faire découvrir les vins sains, conseiller des accords, avec de la nourriture ou pour des moments de vie et des émotions, elles ont donc choisi de le faire en ligne, mais pas question d’effacer l’humain de l’équation. Elles concoctent aussi en IRL une fois par mois, des rencontres. Pour épouser les contours des contraintes et limites des protocoles sanitaires de saison, elles ont trouvé le concept des ventes privées dans leur studio refuge et les dégustations à même le trottoir pour garder le lien humain de leur commerce de ces vins ainsi que la mise en lumière d’un acteur du milieu (sommelier, chef, vigneron, vignoble).
Demain samedi, dégustation spéciale Saint-Valentin et des vins des autres sélections, à l’adresse ci-dessous, de 12 à 18 heures.
Audrey Vacher
Ainsi Fontaine
Studio Beaujour Bonsoir
30 rue Piat, 75020 Paris